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dimanche 13 décembre 2009

Les tartes et le millefeuille

En ces jours de fêtes de fin de d'année, la métaphore pâtissière est de rigueur pour essayer de défaire et peut être de comprendre l'écheveau compliqué de la bataille pour la réforme des collectivités territoriales en France.
D'un côté, les tenants de la réforme qui visent le gâteau électoral et fiscal des grandes féodalités, et de l'autre, les seigneurs locaux, agitant la tarte à la crème de l'antidémocratie et assis sur leurs trésors de guerre, qui tiennent par dessus tout à garder leur main mise sur le fantastique maillage administratif de notre nation.
Il faut dire que l'héritage est lourd. Mille ans de stabilité territoriale et de frontières presque inchangées ont généré pas moins de 36000 communes soit autant que dans toute l'Europe de l'Ouest réunie avec une population moyenne de 1500 habitants (11500 en Belgique...). A cela s'est ajouté la volonté du législateur révolutionnaire de découper à la hachette, voir à la guillotine, les duchés et autres comtés pour en faire des départements plus maîtrisables par le pouvoir central. Enfin, les années soixante ont vu l'apparition de la décentralisation moderne consécutive à une volonté initiale de rapprocher les lieux de décision des habitants et ensuite accélérée par la déroute financière de l'Etat, trop heureux de se désengager sur le dos des élus locaux. Le millefeuille français était né, entrelacement inextricable de sièges électifs, de compétences auto attribuées et d'ego surdimentionné. De quoi effrayer même les plus courageux des investisseurs et analystes étrangers, seuls peut être les chinois avec leur tradition millénaire de centralisme décentralisé arrivant à y retrouver leurs ouailles...
Et sur ces entrefaits, débarque un Nicolas Sarkozy, pourtant ancien président de Conseil général, comptable des deniers de la République et des sièges de l'UMP. Le Président de la République donne vraiment l'impression d'être comme un chien dans un jeu de quilles. Renversant même ceux de son propre camp, il fonce tête baissée afin de réformer à juste titre l'impôt le plus bête de la création, la taxe professionnelle, et remettant en cause l'équilibre du suffrage universel afin de récupérer des collectivités territoriales échappées du giron majoritaire.
Si la première démarche était économiquement expressément nécessaire, la deuxième, nonobstant le fait électoral, me semble peu équitable et entachée d'irrégularité philosophique sinon constitutionnelle. Toute collectivité, toute entité élue a besoin de la légitimité des urnes et croire qu'avec 30% des votants pour la liste arrivée en tête, on puisse gouverner sans soucis une région ou un département, est une vue de l'esprit et une aberration politique. En revanche, les résistances locales qui s'organisent à travers les conseil généraux voués à devenir des chambres basses d'une région omnipotente, me font sourire. Les arguments avancés par les défenseurs de ces collectivités "révolutionnaires" ne manquent pas de piquant. Car ce qu'ils reprochent souvent au Président de la République, eux-mêmes le pratiquent sans vergogne dans leurs "principautés". Népotisme, cooptation, copinage et poigne de fer sont en général les mamelles fécondes de leur gouvernance. De plus, la gauche socialiste sentant le Sénat mûr pour une alternance historique, voit d'un très mauvais oeil toute atteinte à ce tiroir caisse que sont les subventions aux communes très rurales, vivier captif de grands électeurs.
La confrontation d'idées était obligatoire et la course à l'échalote qui s'en suivit, une fatalité. Le plus rapide et le plus tenace croira rafler la mise alors qu'une entente cordiale aurait été bien plus productive en plaçant la France et ses territoires dans une fenêtre de tir favorable pour se positionner dans le grand concert européen du développement.
Notre pays vaut mieux qu'une bataille de chiffre ou une guerre de position d'élus obtus. La réforme était nécessaire mais le consensus tout autant. De tous bords, je croyais bêtement qu'on avait compris qu'il faut parfois savoir perdre une bataille pour gagner la guerre de la réforme. Aujourd'hui j'en doute plus que jamais...

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